Christian Gammon-Roy
Tribune
Après trois années d’annulations successives, le gala biannuel d’Intégration communautaire prévu en 2020 a pu enfin aller de l’avant, et il a largement compensé les déceptions antérieures en fracassant son record de levée de fonds. Parés de leurs meilleurs habits ‘disco’, les 255 invités se sont réunis à la salle Marcel Noël de Sturgeon Falls le 29 avril pour faire la fête. Ils étaient impatients de dépenser leur argent pour une soirée de dégustation, de musique, de jeux et de ventes aux enchères, le tout au profit d’une bonne cause.
«Il s’agit de notre événement le plus réussi. […] En ce qui concerne les fonds recueillis, il s’agit d’une année record», d’enthousiasmer Sylvie Bélanger, directrice générale d’Intégration communautaire de Nipissing Ouest. En effet, la soirée a généré 52 818$ en profit, ce qui permettra d’offrir des activités et des soutiens spéciaux aux clients de l’organisme.
«Notre dernier gala a eu lieu en 2018, et nous l’avons annulé en 2020 un mois avant la date prévue,» explique Mme Bélanger. Or, tout était fin prêt pour aller de l’avant dès la levée des restrictions. «Nous avons utilisé les mêmes traiteurs, les mêmes décorateurs et, comme nous n’avons fait que reporter l’événement, nous avons choisi une date chaque année, de sorte qu’ils savaient qu’ils devaient nous la garder. Lorsque cela ne se produisait pas, nous reportions la date à une autre date, donc tout était déjà réservé depuis 2020. (…) Ainsi, lorsque le projet a été relancé, tout le monde était déjà à bord. Nous avions déjà réservé les musiciens, les décorateurs, les traiteurs, tout. C’était la partie la plus facile,» décrit-elle.
Même les commanditaires de 2020 étaient encore à bord. Selon Mme Bélanger, lorsqu’ils ont appelé les entreprises commanditaires pour leur annoncer l’annulation en 2020, tous leur ont dit de garder les chèques pour la prochaine fois. «Au gala, il y a dix tables d’entreprises commanditaires, que nous appelons nos tables VIP pour la soirée. Ils paient donc un peu plus cher pour avoir l’une de ces tables, mais ils bénéficient également d’un traitement VIP tout au long de la soirée,» décrit Mme Bélanger. Il y a maintenant une liste d’attente pour obtenir l’une de ces tables, car certains des commanditaires principaux sont présents depuis le premier gala.
Malgré la planification et le soutien déjà établis, les organisateurs n’étaient pas certains à quoi s’attendre après tant de temps. La décision a été prise en janvier d’organiser le gala cette année. «Nous ne savions pas si le gala allait être un succès parce que certaines personnes sont encore préoccupées par la COVID, mais nous avons été très agréablement surpris et très heureux des résultats. Les gens étaient impatients de sortir à nouveau, de faire la fête et de revenir à la normale,» constate Mme Bélanger.
Avant cette année, la plus grande somme générée par un gala était d’environ 42 000$. L’autre mesure de succès, selon Mme Bélanger, c’est que «après les ventes aux enchères, les gens venaient nous voir et nous félicitaient du succès de la soirée en disant que c’était très amusant et bien organisé. Il y a tellement de travail investi, et lorsque vous recevez ces commentaires des gens, qui vous disent qu’ils se sont amusés, qu’ils ont passé un bon moment, qu’ils ont adoré l’événement, c’est là qu’on peut se détendre enfin.»
Mme Bélanger explique que l’objectif n’est pas de recueillir toujours plus d’argent chaque année, mais plutôt de continuer à répondre aux besoins des clients. «Tant que nous gagnons de l’argent, c’est notre but, ce n’est pas d’en gagner toujours plus; nous voulons simplement collecter des fonds pour pouvoir aider les personnes que nous soutenons,» dit-elle. Cet argent est ensuite mis dans le Fonds du comité du gala, géré par un groupe de bénévoles, d’employés et directeurs d’Intégration communautaire et d’auto-intervenants. «Il y a un processus de demande pour obtenir ce financement, et il sert à couvrir tout ce qui n’est pas couvert par le POSPH (prestations provinciales) ou la pension de la personne.»
Lorsqu’on lui demande de donner des exemples, la très longue liste révèle un écart important entre le soutien de base accordé aux personnes ayant une déficience intellectuelle et ce qui est réellement nécessaire pour améliorer leur qualité de vie. Mme Bélanger explique qu’une grande partie des fonds versés sert simplement à couvrir les dépenses supplémentaires liées aux soins de santé ou à l’équipement médical à domicile qui ne sont pas couvertes par le POSPH. Elle précise qu’il s’agit de prothèses dentaires, de thérapies spéciales, de conseils, de lits d’hôpitaux, de scooters, d’orthèses, et ainsi de suite. Une autre partie du fonds est consacrée aux équipements d’accessibilité et de mobilité qui permettent aux personnes handicapées de faire des choses que beaucoup tiennent pour acquises. «Une poussette qui va sur la plage avec des grosses roues ne sera pas couverte. Ce sont des extras que les familles ne peuvent pas se permettre d’acheter. Elles obtiennent le minimum et leur fauteuil roulant est couvert, mais il est impossible d’emmener son enfant à la plage avec un fauteuil roulant régulier,» donne-t-elle en exemple.
Souvent, le coût de ces équipements est prohibitif. Mme Bélanger donne un autre exemple : pour qu’un enfant ait une bicyclette adaptée, il faut compter environ 3 000$. «Cela améliore leur qualité de vie. Ils ne peuvent tout simplement pas se permettre d’avoir ces choses que nous avons tous ou que nous achèterions sans y penser. Ce n’est pas un luxe,» déplore-t-elle.
Le Fonds du gala a également permis de répondre à d’autres demandes plus spécifiques. «Nous avons payé un voyage à une personne qui avait repris contact avec sa famille et dont le parent était en fin de vie. Nous avons donc payé le voyage pour qu’elle puisse aller le voir avec une personne soutien. Ils n’auraient pas pu se le permettre autrement,» se souvient Mme Bélanger. Une partie du financement sert également à financer des loisirs et des activités récréatives.
Lorsqu’on lui demande s’il est parfois frustrant de constater l’ampleur du soutien que l’organisme doit apporter en raison du manque de financement gouvernemental que reçoivent ses clients, Mme Bélanger répond qu’elle fait partie de groupes provinciaux qui cherchent à changer cette situation en réclamant des taux plus élevés pour le POSPH et d’autres formes de soutien de la part du gouvernement. Elle met les choses en perspective : «Si vous vivez dans un foyer de groupe, ou même si vous vivez dans la communauté, vous recevez une allocation de dépenses de 149$. Tout le reste sert à payer le loyer et [les autres frais de subsistance]. Vous et moi ne pourrions pas vivre avec 149$ une fois toutes les dépenses payées. […] Cela ne permet même pas de rattraper les augmentations du coût de la vie. Nos gens ont recours aux banques alimentaires tout le temps! Nous mettons de l’argent de côté au cas où ils auraient des loisirs; ils ne peuvent rien s’offrir.»